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UN MODÈLE ÉCONOMIQUE COMMUNAUTAIRE EST-IL POSSIBLE DANS LE NUMÉRIQUE ?

CHAPITRE 2

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EXISTE-T-IL DES MODÈLES ÉCONOMIQUES NON PRÉDATEURS...

En 2018 le marché des Apps mobile, un des marchés les plus importants de la planète va intégrer le Top 10. Nous parlons d’un marché devant atteindre les 100B$ concernant près de 7 Millions d’Apps avec 200 Billions de téléchargements (350 en 2021), concernant toutes les générations avec en moyenne quotidiennement 10 Apps ouvertes, 3.2 Heures passées par les 18-24 ans et 1.6 heure pour les + de 65 ans. C’est également une population de près de 12 Millions de développeurs d’Apps, soit un peu moins de la moitié des 21 Millions de développeurs logiciel au niveau monde. Dans les principaux fournisseurs d’Apps, ne soyons pas surpris de retrouver iOS Apps via Apple (2.2 Millions), Android via Google, Tencent, Xiaomi (3.3 Millions), et à moindre échelle Amazon (600 k) et Microsoft.

UN TREMPLIN POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

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VERS UNE ÉCONOMIE DE SERVICE ET D'ÉCHELLE

L'HOMME NUMÉRIQUE DU XXIe SIÈCLE REPRODUIRA-T-IL LES MODÈLES ÉCONOMIQUES DU XXe SIÈCLE ?

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VERS UN HYPERCAPITALISME

AMAZON, LE GRAND "LIQUIDATEUR DE LA TERRE" ?

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VERS UN ÉLAN DE COOPÉRATIF 4.0

AMAZON vs "C'EST QUI LE PATRON ?", VERS QUEL MONDE ALLONS-NOUS ?

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LE MARCHÉ DES APPS

PREMIERS ÉLÉMENTS DE RÉPONSE...

INTRO

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« Sommes-nous prêts à laisser les GAFAM maitres du monde… Hum, comment dire ? »

Eric Scherer

« La croissance associée à la mécanisation de l’agriculture puis de l’industrie devrait s’interrompre, à mesure que la société basculera vers une économie de services »

Jean Fourastié

50%

de l'énergie mondiale sera consommée pour sauvergarder des données

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En milliards de dollars, le montant des incestissements d'Amazon

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En milliards de dollars, le chiffre d'affaires d'Amazon

566 000

 

Le nombre de salariés d'Amazon

3

 

En milliards de dollars, le résultat net d'Amazon

AMAZON CAPTE PLUS DE 50% DE L'ARGENT DÉPENSÉ EN LIGNE AUX ÉTATS-UNIS. CELA REPRÉSENTE PRÈS DE 4% DU COMMERCE MONDIAL

« C’est comme si nous vivions un forme de distorsion concurrentielle »

Daniel Cohen

NOUS RESTONS AU COEUR D'UN CAPITALISME DISRUPTIF ET ABUSIF AVEC CETTE FOIS, NON PAS L'EUROPE EN VICTIME, MAIS LES GRANDES ENSEIGNES DE DISTRIBUTION TELLES QUE CARREFOUR OU WALLMART

LE MARCHÉ DES APPS : UN TREMPLIN POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'ÉCONOMIE NUMÉRIQUE

 

Si nous regardons rapidement la population des développeurs d’Apps, elle représente aujourd’hui la moitié des développeurs de logiciels dans le monde soit plus de 12 Millions et est en croissance constante pour une estimation de 14 Millions en 2020. Elle est centrée sur le développement d’Apps dans les domaines : Réseaux sociaux, musique, multimédia, jeux, …pour les plus significatifs. Les continents les plus actifs à poids égal sont les USA, l’Europe et l’Asie.

 

Cela peut se matérialiser également par des marchés spécifiques comme celui des banques et la fintech avec une constellation d’API permettant de faciliter les transactions ou de payer en ligne. Des usages qui sont du ressort du service du public, avec le développement d’Apps pour le maintien d’anciens services pour des populations désocialisées et fragiles. L’opportunité d’aller en terrain vierge et créer de nouveaux business, en support de l’existant (exemple : domotique) générant parfois des conflits de générations et d’approches. Ou de venir sur le terrain du ludique pour enfants... Une licorne peut naitre d’une Apps et venir titiller les GAFAM et BATX. C’est le cas par exemple de l’Apps « Douyin – Alias TikTok » dédiée aux vidéos courtes, avec déjà 700 Millions d’utilisateurs en 18 mois et plus d’1 Milliard de vidéos vu chaque jour.

SOMMAIRE

SUITE

L'HOMME NUMÉRIQUE DU XXIe SIÈCLE REPRODUIRA-T-IL LES MODÈLES ÉCONOMIQUES DU XXe SIÈCLE ?

 

Le développement de l’économie numérique n’est plus à démontrer mais pour faciliter la poursuite des travaux dans ce sens lors des prochaines sessions de l’INTEFP, nous aimerions mettre en avant quelques points de questionnement autour de cette thématique.

 

D’un point de vue développement économique, il nous apparait évident que les géants de l’internet, qu’ils soient américains ou chinois, recherchent en permanence à maintenir et développer leur position sur le marché. Ceci se traduit par l’acquisition du moindre concurrent d’un côté sous forme d’une prédation féroce, et de l’autre par un élargissement de l’offre par l’acquisition ou la prise de parts dans des nouvelles start-up en lien direct avec le marché ou comme opportunités d’ouverture à de nouveaux marchés ou purement financières.

 

Cette réflexion est à rapprocher des propos de Daniel Cohen dans son livre « Il faut dire que les temps ont changé » (Ed. Albin Michel), où il souligne que la notion d’économie d’échelle est un concept fondamental de l’analyse économique. Plus la clientèle d’une entreprise augmente, plus elle prospère, ce qui lui évite de se retrouver condamnée à stagner au-delà d’une certaine taille. Tout ce qui ne bénéficie pas de rendement d’échelle tend à être transféré à la charge du consommateur. Pour bénéficier au maximum de tels rendements d’échelle, il faut des technologies nouvelles pour démultiplier la force de frappe des producteurs. C’est donc bien l’homme qui est au cœur de la société postindustrielle, mais l’homme préalablement numérisé pour épancher la soif inextinguible de croissance des sociétés modernes. Aujourd’hui, le logiciel fait accomplir aux consommateurs eux-mêmes les tâches qui étaient salariées hier. Les GAFAM en sont une illustration parfaite.

 

La pluralité des modèles économiques nous semble également un point à étudier dans la mesure où le modèle américain centré sur le capitalisme à tout prix, s’oppose d’un côté au modèle en devenir d’une économie solidaire, inclusive, durable avec une forte identité nationale matérialisé par l’Inde et l’Afrique, et d’un autre côté un modèle hyper protectionniste symbolisé par l’Europe, la Chine endossant les caractéristiques des modèles américains et indiens. Si nous regardons quelques dimensions géographiques et écologiques de cette économie numérique, nous constatons que l’histoire semble se répéter. Les intentions de départ consistant à déployer l’électricité au profit du développement de l’artisanat local ou le réseau ferroviaire au profit du développement des petites agglomérations n’ont pas été au rendez-vous. C’est le phénomène inverse qui s’est produit et qui a vu les grandes entreprises et les grandes villes se développer. Nous assistons au développement de mégapoles illustré par la recomposition géographique de l’Inde ou de la Chine, une forme de nouvel exode rural à très grande échelle, ce que les spécialistes appellent le « principe de métropolisation ».

 

L’économie numérique ne semble pas échapper à cette règle au profit du développement accéléré des géants de l’internet et ce aux détriments des producteurs de valeurs. Ce point avait été abordé sous l’angle du déséquilibre numérique campagnes et mégapoles par Bruno Moriset. En termes d’écologie, de gestion de l’énergie et de questions environnementales, nous devrons certainement nous poser les questions de l’« hyper-logistification » du monde et le développement énergétique nécessaire à maintenir de la donnée et faire fonctionner cette nouvelle économie. Les grands experts prédisent qu'elle consommera 50 % de l’énergie planétaire dans les 10 prochaines années.

 

Suite à l’intervention de François Levin et Judith Herzog (CN Numérique) sur l’opposition entre un imaginaire où tout est possible et la vampirisation des GAFA où tout s'achète et est argent, nous sommes amenés à réfléchir sur l’attractivité du futur de la société proposé par l’économie numérique. D’un côté le marché des Apps qui s’ouvre sur un monde infini et sans limite où tout serait possible. Nicolas Santolaria le montre très bien dans son livre « J’ai sous-traité ma vie » (Allary editions) de manière humoristique nous invitant à son propre voyage initiatique dans le monde des Apps en réponse à des besoins quotidienne. Une App pour presque tout ! À quand la IApps, clin d’œil à l’Intelligence artificielle ? De l’autre côté un marché « sur-capitalistique » dans lequel les géants de l’internet excellent dans la numérisation de l’homme à des fins purement financière. Comme Eric Scherer (France Télévisons) le souligne très adroitement : « Sommes-nous prêts à laisser les GAFAM maitres du Monde… Hum, comment dire ? ». Regard acerbe ou s’entremêlent la montée en puissance financière, un déclin annoncé, une hégémonie et des monopoles, une domination, une forme de « génocide » des start-up, des démocraties « trollées », une drogue numérique, l’addiction, des solutions, un contrepouvoir et une réaction. Autant de mots forts qui amèneront certainement des débats futurs.

 

Il nous apparait également évident que la poursuite de la croissance économique du numérique passera par le développement de technologies nouvelles (E.Brynjolfsson & A.McAfee - The second machine age – Work, Progress, and Prosperity in a time of brilliant technologies) repoussant parfois les limites de l’éthique au profit du business. Les transhumanistes plaident pour une hybridation entre l’humain et le numérique, l’organique et le digital. Or cette hybridation a déjà commencé. L’iphone est devenu un nouvel organe du corps humain. Pour Escande-Gauquié et Naivin, la culture numérique a construit un être hybride fait de réseaux et d’algorithmes. Dans le monde du numérique : c’est l’homme qui est devenu le produit nouveau, celui que l’on doit éduquer, connecter, réparer et divertir. Pour Daniel Cohen, la question n’est pas de savoir si les robots auront un jour des émotions semblables aux nôtres. Elle est de savoir si nous, humains, somme prêts à leur accorder notre affection. Qu’ils deviennent les complices de nos actions et de nos relations à autrui.

 

Enfin pour finir, selon Yuval Noah Harari – Homo Deus ou une brève histoire de l’avenir (Albin Michel) : «La prochaine étape annoncée est tout simplement que l’homme devienne Dieu : qu’il triomphe de la mort en fusionnant l’intelligence humaine et celle des logiciels». Tous semblent se rejoindre sur l’ouverture d’un débat autour de la place de l’homme face à ces évolutions majeures.

  • Quel modèle économique va sortir vainqueur de cette nouvelle économie ?
  • Qui sera le mieux armé pour faire face à l’évolution du monde ?
  • Des pays experts en innovation frugale (exemple de la voiture low-cost indienne : La Kwid) ou le pas grand-chose devient source d’espérance et d’inspiration ou plutôt des pays riches ayant financé l’innovation à coup de milliards de dollars ?
  • La technologie répondra-t-elle toujours présente pour accompagner ces mutations et vers qui se retournera-t-elle ?
  • Economie capitalistique ou économie solidaire et inclusive ? Laisserons-nous indéfiniment une minorité d’entreprises régenter le monde à notre insu et sur notre dos ?

Comme nous invite à le faire Jacques Segala : reprenons possession de nos données, de notre vie.

 

Nous finirons par le regard de Jean Fourastié sur ces évolutions – Le grand espoir du XXéme siécle (Gallimard) : « La croissance associée à la mécanisation de l’agriculture puis de l’industrie devrait s’interrompre, à mesure que la société basculera vers une économie de services ». La baisse de la croissance est selon lui la contrepartie nécessaire du passage à une économie de services. Nous y sommes !

 

TikTok, app dédiée aux vidéos courtes a déjà 700 Millions d’utilisateurs en 18 mois d'existence et plus d’1 Milliard de vidéos vues chaque jour

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AUJOURD'HUI, LE LOGICIEL FAIT ACCOMPLIR AUX CONSOMMATEURS EUX-MÊMES LES TÂCHES QUI ÉTAIENT SALARIÉES HIER. LES GAFAM EN SONT UNE ILLUSTRATION PARFAITE.

LES GRANDS EXPERTS PRÉDISENT QUE LA CONSERVATION DES DONNÉES CONSOMMERA 50% DE L'ÉNERGIE PLANÉTAIRE DANS LES 10 PROCHAINES ANNÉES

« Sommes-nous prêts à laisser les GAFAM maitres du monde… Hum, comment dire ? »

Eric Scherer

DANS LE MONDE NUMÉRIQUE C'EST L'HOMME QUI EST DEVENU LE PRODUIT NOUVEAU

« La croissance associée à la mécanisation de l’agriculture puis de l’industrie devrait s’interrompre, à mesure que la société basculera vers une économie de services »

Jean Fourastié

 

 

    APPEL A REFLEXIONS POUR LA 36e SESSION

 

1. L'économie numérique est intrinsèquement une économie de prédateurs

 

2. Il existe différents modèles économiques dans le numérique

 

3. Le phénomène de concentration et de métropolisation se reproduit  dans et grâce à l'économie numérique

 

4. Le développement du numérique passera par la création de technologies nouvelles questionnant notre éthique

 

5. À qui donne-je ou confie-je mes données sont des questions essentielles pour l'homme numérique du XXIe siècle

 

6. Prendre le contrôle de ses données est-ce reprendre le contrôle de sa vie ?

 

7. Modèle économique numérique et modèle de société sont étroitement liés

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En milliards de dollars, le chiffre d'affaires d'Amazon

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En milliards de dollars, le résultat net d'Amazon

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En milliards de dollars, le montant des incestissements d'Amazon

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Le nombre de salariés d'Amazon

DE LA SIMPLE LIBRAIRIE EN LIGNE, AMAZON EN A FAIT UNE PLACE DE L'INDUSTRIE DE LA LIBRAIRIE ALLANT JUSQU'À L'OUVERTURE DE LIBRAIRIES DANS LES GRANDES VILLES ET D'ENVISAGER DES MILLIERS D'ÉPICERIES ET DE FAST-FOOD FUTURISTES

AMAZON CAPTE PLUS DE 50% DE L'ARGENT DÉPENSÉ EN LIGNE AUX ÉTATS-UNIS. CELA REPRÉSENTE PRÈS DE 4% DU COMMERCE MONDIAL

FACE AUX SOLUTIONS COMMUNAUTAIRES, AMAZON PROPOSE UNE FORME D'ALTERNATIVE AVEC UNE APPROCHE DE MARCHÉ DE VOLUME CONTRE LAQUELLE IL EST DIFFICILE DE LUTTER

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Infographie réalisée dans le dossier "Le nouveau maître du monde" dans L'Obs n°2812 du 27 septembre 2018

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AMAZON, LE GRAND "LIQUIDATEUR DE LA TERRE" ?

 

Nous avons volontairement choisi de développer cette problématique autour du développement du géant américain Amazon car du point de vue de la compréhension de cette problématique, son modèle rassemble l’ensemble des ingrédients pertinents nécessaires à l’analyse. En partant du dossier intitulé « Le nouveau maître du monde » du cahier N° 2812 de l’Obs (27 septembre 2018), il est intéressant d’étudier le schéma de l’empire Amazon intégrant le e-commerce, les magasins et le « market place », la logistique et l’abonnement « prime », les activités de « Web services », les supports numériques dont la fameuse Alexia qui prend place au sein de la cellule familiale, les contenus vidéo, les Apps, la conquête de l’espace avec « Blue origine ». Autant d’opportunités de croissance et de batailles livrées avec les acteurs actuels de ces différents domaines.

 

Sans trop s’étendre sur les chiffres clés, il est important de rappeler qu’Amazon, représente un CA de 145 B$ pour un résultat net de 3B$ , 17 B$ d’investissement, 566.000 salariés et une capitalisation financière à 1000 B$ à la hauteur de celle d’Apple. On peut dire que Jeff Bezos son fondateur a transformé en seulement 23 ans une simple librairie en ligne en titan de la technologie, du commerce et de la production audiovisuelle, et souvent sur le dos des principaux acteurs des marchés et domaines visés avec comme devise « Tout est possible, tout est fragile, tout reste à faire ». Amazon peut être certainement vu comme le grand prédateur américain de la nouvelle économie. Selon John Rossman, un de ses ex-dirigeants, toutes les innovations d’Amazon partent de la volonté d’éliminer les frictions qui gênent le consommateur et gagner sa confiance. C’est ainsi que la livraison gratuite, la publication des critiques ou « feed-back », la fidélisation au travers du programme « prime » sont apparues dans la sphère de la nouvelle économie.

 

La construction de l’empire d’Amazon dans le commerce en ligne passe par la destruction ou l’absorption progressive de nouvelles idées. L’exemple d’Etsy, plateforme de produits créatifs et faits main, est éloquent. Amazon a commencé par mettre en face une offre comparable en 3 étapes :

  • 800.000 produits faits mains (Etape 1),
  • création d’une section cadeaux (Etape 2),
  • ouverture de « Vitrines en ligne » où l’accès aux produits de 200.000 PME américaines (Etape 3)

Ce qui démontre bien la capacité d’Amazon à tuer une idée de produit que son fondateur trouve intéressante en amenant le volume nécessaire à une économie évolutive d’un point de vue financier.  Amazon ne peut plus se contenter du monde virtuel devant un marché qui lui reste unique et va commencer à ouvrir des magasins physiques et lance officiellement la guerre aux grandes enseignes tout en essayant de finaliser quelques accords avec certaines enseignes ou lancer des tentatives de rachat d’enseignes.

 

Mais les grandes enseignes commencent à mettre en place des stratégies anti-Amazon. Même la concurrence rentre dans le magasin au travers d’applications comparatives. Les effets sont immédiats sur la consommation. Amazon a ouvert également sa place de marché en proposant ses moyens numériques et logistiques aux producteurs locaux, une autre façon d’endiguer la montée des plateformes communautaires et solidaires. De la simple librairie en ligne, Amazon en a fait également une place forte de l’industrie de la librairie allant jusqu’à l’ouverture de libraires dans les grandes villes, d’envisager de lancer des milliers d’épiceries et de fast-food futuristes. Avec toujours la même envie de faire croitre son business.

 

Le développement d’Amazon passe également par le développement d’Amazon Web Services qui concurrence les grands acteurs actuels du domaine en s’imposant au sein des grandes institutions. Cette activité représente la plus grosse part de la capitalisation d’Amazon en bourse. La diversification passe également par des investissements lourds en logistique (Avions, flotte de camions, drones, véhicules autonomes) nécessaires à la croissance de son commerce en ligne, par la diffusion de contenus medias au travers d’Amazon Vidéo, d’une activité « Conquête de l’espace » et voyages touristiques spatiaux. Autant de sources d’investissement utiles au développement de la planète allant jusqu’à rêver d’usines polluantes en orbite et d'un centre de logistique sur la lune… Amazon va jusqu’à pousser l’économie américaine en s’attaquant à un de ses symboles nationaux « Le revenu minimum ».

 

Certains y verront, à juste titre et avec un regard cynique, le moyen de faire augmenter la consommation américaine des plus « démunis ». Pour information, Amazon capte plus de 50 % de l’argent dépensé en ligne aux USA soit 4% du commerce mondial. Ce qui ouvre beaucoup d’interrogations pour le futur. La donnée reste centrale pour Amazon. La réactivité d’Amazon à se positionner avec fracas sur des marchés nouveaux et nouvelles approches que Jeff Bezos trouvent intéressants, laisse à penser qu’une forme de bras de fer va s’engager dans le futur entre une approche hyper capitalistique dans laquelle la puissance d’Amazon risque de devenir problématique et une approche centrée sur le besoin communautaire, inclusif et solidaire refusant toute forme de capitalisme extrême, celle du juste nécessaire pour vivre bien.

 

On voit bien que par rapport aux solutions communautaires découvertes pour la plupart lors de la 35éme session de l'Intefp, Amazon propose une forme d’alternative avec une approche de marché de volume embarquant rapidement l’ensemble des acteurs économiques américains avec laquelle il est difficile de lutter. Par exemple on commence à trouver en face de la Ruche Qui Dit Oui : Big Basket et maintenant Epicery pour la France, une solution « Market Place » et les épiceries d’Amazon. En face de Mangroove on trouve la solution librairie en ligne et physique avec propositions de contenus. En face de DigitalGreen on trouve la solution Amazon Vidéo associée à son fonds d’entraide des plus démunis (2 milliards de dollars). L’Activité de OuiShare semble encore échapper aux griffes de l’ogre car elle demande certainement de convaincre des contributeurs de haut niveau

 

Par ailleurs on voit que les grandes enseignes de distribution commencent à venir supporter ces plateformes communautaires comme C’est Qui Le Patron volant au secours des producteurs laitiers afin de leurs garantir un revenu décent. Faut-il y voir comme un symbole de la résistance organisé face à Amazon des grandes enseignes ? L’Europe s’organise également sous le mode communautaire. Les nouvelles formes de défense face à l’attitude de prédateur des géants de la nouvelle économie semblent soulever un vent de révolte de la part de nombreux acteurs symbolisés par les géants conventionnels de l’économie « old fashion ». Que ce soient les néo-géants de l’économie, tant au niveau de la distribution que du développement et de la production de produits et de services, ou les communautés défendant les dimensions qui ont guidés le monde : communautarisme, solidarité, partage, bien être... émergent de nouveaux modes de protectionnisme face à cet hyper capitalisme.

 

NOUS RESTONS AU COEUR D'UN CAPITALISME DISRUPTIF ET ABUSIF AVEC CETTE FOIS, NON PAS L'EUROPE EN VICTIME, MAIS LES GRANDES ENSEIGNES DE DISTRIBUTION TELLES QUE CARREFOUR OU WALLMART

AMAZON vs "C'EST QUI LE PATRON ?", VERS QUEL MONDE ALLONS-NOUS ?

 

Nul ne peut penser que les géants du web se contenteront d’un monde virtuel. La fragilisation des grandes enseignes de distribution encore distantes des modèles disruptifs de la concurrence américaine et chinoise, le besoin de nouvelles technologies pour garantir la croissance du business ou à défaut leur absence, l’attirance de cette même technologie permettant aux leaders charismatiques de marquer l’histoire avec en tête l’opportunité d’agrandir leur empire à la conquête d’un nouveau monde pas forcément « numérique » en sont des arguments.

 

Il semble que pour le moment rien ne vienne entraver la progression de ces géants du web. Le marché mondial n’est-il pas unique ? Il suffit de regarder comment Ali Baba et Amazon tentent de proposer des lieux physiques au travers de tentatives d’alliances avec de grands distributeurs ou à défaut de guerres économiques avec les mêmes acteurs. Allons-nous vers un modèle hybride du service avec un équilibre Physique / Virtuel ? La course à l’imaginaire comme présentée par le Conseil du Numérique n’est-elle pas source de revenus pour ces acteurs et de dépense pour le consommateur ? Comment retenir un consommateur dans son écosystème que ce soit sur un site internet, une plateforme ou dans un espace physique de consommation ? L’e-commerce pousse les acteurs de différents secteurs à repenser l’espace physique clients et aux mouvements communautaires anti capitalisme à s’organiser. La révolte pour un monde plus collaboratif et équitable est-elle en marche ?

 

Au fil des débats, des visites, des rencontres nous avons progressivement pu commencer à structurer un début de réflexion autour de cette problématique. Si nous restons encore une fois sur les prédictions de Bernard Steigler, Amazon serait le grand liquidateur du Monde dans le but ultime de rester le seul vendeur du Monde. Nous rentrons dans une logique de "seigneur de la guerre " sans foi car les lois n'existent pas dans la nouvelle économie. Nous restons au cœur d’un capitalisme disruptif et abusif avec cette fois non pas l’Europe en victime, mais les grandes enseignes de distribution telles que Carrefour en France ou Wallmart aux USA, ou les néo-communautés collaboratives devenues trop attractives dans l’offre proposée. Un bouleversement qui invite les acteurs à se protéger à coups d’alliances surprenantes parfois, à refuser les propositions d’alliances avec Amazon et qui engendre à travers des mouvements de rébellion des consommateurs l’émergence d’approches communautaires centrées sur le collaboratif, la solidarité, l’inclusion, le social, la reconquête du « vivre vrai et ensemble ». Ce qui nous amène à réfléchir sur les déséquilibres et les recompositions que nous risquons de rencontrer dans un futur proche.

 

Parmi les nombreuses sources inspirantes qui ont fait l’objet d’attention tout au long de notre périple, nous avons eu envie d’en retenir quelques-unes en lien direct avec notre problématique. Commençons par les « grandes enseignes » avec d’un côté l’intervention du DRH de Carrefour avec un regard « freiné » sur ce que pourrait être l’évolution de ce groupe dans la bataille qu’il devra livrer à ses concurrents directs et les géants du e-commerce. Le rachat de sociétés de commerce en ligne comme « Rue du commerce » et « Ooshoop », les ristournes accordées aux salariés qui investissent sur des supports numériques, un accord signé avec les partenaires sociaux, est-ce suffisant face au 17 milliards de dollars d’investissements d’Amazon ? « C’est comme si nous vivions un forme de distorsion concurrentielle », pour Daniel Cohen. Depuis son intervention, une réorganisation est en marche chez Carrefour et un accord avec Google a changé un peu le paysage du Groupe et certainement sa vision du futur. De l’autre, un des géants du sport Décathlon qui tente de se développer en Inde en proposant une offre globale allant du design à la vente et sous la bannière « OMNI Commerce » ou la garantie que la vente en ligne et la vente en magasins se font au même prix. Et l’idée qu’un consommateur qui rentre dans un magasin achète en moyenne 1 à 2 articles de plus que celui ciblé initialement.

 

La dimension « communautaire » (rétribution et partage de valeurs, solidarité, inclusion...)  a été de nombreuses fois abordée tout au long de cette session sous différents angles. D’abord sous l’angle des pays avec l'Inde et les 70 % de sa population dans l'agriculture qui voit naitre progressivement une forme d’écosystème entre KSNDMC (Prévention, éducation), Digital Green (Equité, solidarité, formation à la technologie mais également à l’économie financière, logistique et partage de savoirs), Big Basket (Rétribution et partage de valeurs, valorisation du producteur) et les dispositifs mis en œuvre pour assurer les échanges d’informations entre agriculteurs. La dimension communautaire a été également vue sous l’angle des « filières » comme la plateforme Mangroove évoluant sur l’univers du livre, première bataille gagnée par Amazon, et sa volonté de rendre du pouvoir aux utilisateurs en proposant des choses différentes d'Amazon (contenus, rôle clé, services,..) et contribuer fortement à la défense du commerce de proximité, endiguer les fermetures de librairies, valoriser le travail des acteurs du livre. C’est également le cas de OuiShare qui œuvre dans le domaine de la technologie et de l’innovation prônant un modèle mutualiste glissant progressivement vers un modèle plus coopératif et vers une économie solidaire organisée autour du partage de savoirs et des connaissances. Autre approche intéressante, La Ruche qui dit Oui (Lien intervention) au travers d’une économie numérique solidaire et sociale permettant aux consommateurs et producteurs locaux de se rencontrer dans un lieu (La ruche) avec comme sas d’entrée la plateforme numérique comme lieu de passage obligatoire. Une forme de modèle de proximité alternatif basé sur des critères de valorisation différents (Forme d’actionnariat de non-salariés).

 

La dimension « Evolution technologique » a également été abordée sous l’angle du déséquilibre engendré par d’un côté la fulgurance de l’économie numérique et de l’autre le besoin de nouvelles technologies parfois encore inaccessibles et demandant du temps pour les développer. Les exemples donnés par Bruno Moriset illustrent bien ce paradoxe. D’un côté les investissements colossaux consentis par Amazon en termes de logistique (Véhicules autonomes, avions, espaces, web services, ….) pour maintenir sa dynamique de croissance, la diversification de Google pour exister au-delà du produit originel, Intel et sa course à la nanotechnologie, la lutte pour la maîtrise de l’Intelligence artificielle entre les USA et la Chine et à moindre niveau d’investissement l’Europe. Le conseil du Numérique s'interroge : comment passer de l'ère du déterministe technologique à l'ère de l'innovation disruptive ? Le regard de sociétés de haute technologie comme Thales (voir ci-contre) est également intéressant car il permet de se rendre compte que le numérique n'est pas une nouveauté en soi mais ce qui change notre monde est l’utilisation massive qui en est fait avec le développement des logiques de services, de troc, de gratuité, d’immédiateté qui fait exploser les business models conventionnels. Cette approche semble générer une forme de développement de réflexes de type pavloviens où les stimulis seraient générés sous des formes modernes par les géants de l’internet avec un seul objectif : la consommation source de croissance et de résultats financiers immédiats sous le couvert du « service » pour le bien de tous....

 

Vers quel champ de développement technologique allons- nous pour quels types de rupture ? Doit-on se satisfaire des technologies développées pour servir le e-commerce (Amazon, Google, Facebook) ou devons-nous réagir par rapport à une autre forme de recherche centrée sur le développement et l’accompagnement du monde face à ses nombreux challenges à relever au-delà de la consommation ? La smart-city par exemple peut être perçue comme un accélérateur du développement technologique selon A.Mayo - Digital Greenwich : Véhicules autonomes, haut débit, big Data et plateformes, énergies intelligentes, écosystèmes sociaux et collaboratifs, hubs d'innovation et accélérateurs de start-ups, smart buildings et réseaux vitaux, cybersécurité, services de proximité & centres commerciaux (Amazon like ?).

 

Nous sommes rentrés dans l’ère de la gratuité avec une accélération des cycles, et une envolée de la valorisation financière des piliers de l’internet. Selon le regard allemand de D.Grillmayer & A.Schild, les services sont plus valorisés en bourse que les produits. Le grand tourbillon, autrement dit la transformation numérique entre accélération des cycles et révolution technologique (B.Downes – ICT) est à l'oeuvre. Selon A.Rallet, la gratuité est un élément central de la construction des marchés numériques, dopée par l'effet réseau. L’économie de partage et du collaboratif, du lien social, de la transaction dans un cadre d'attractivité de la relation, fait face à une économie financière. Nous sommes selon V.Mandinaud de l’ANACT dans un cycle d’innovation effrénée et de rapidité des cycles marché, face à une promesse de collaboration ouverte, opposant l’expérience utilisateurs et la satisfaction clients. Un autre regard est porté par T.Donohoe (IBEC) & T.Rigney (ICTU) autour de ce que devraient être les principes communs de la flexibilité. Une forme d’équilibre entre droits et responsabilités adaptés en fonction des circonstances et des besoins, la parité H/F, le climat de confiance, la distribution des revenus...

 

Il semble y voir comme un dilemme entre le but initial (partage et business) et le sur-investissement financier nécessaire. Ce qui fait que les classes aisées s'approprient ces nouvelles possibilités. Nous sommes devant une nouvelle forme de capitalisme. Nous pouvons aller jusqu’à nous poser la question de savoir dans cette nouvelle économie qui est réellement l’employeur aujourd’hui: l'orientation générale, l’activité, la structure de soutien ou l’organisation ? Pour E.Fernandez (European Foundation) certainement celui qui paie...

 

« C’est comme si nous vivions un forme de distorsion concurrentielle »

Daniel Cohen

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RESSOURCES

INTERVENTIONS

« Les marchés numériques : dynamiques de marché et fragilité des modèles économiques », Alain Rallet

«Exigences du travail, promesses du numérique et défis pour la qualité de vie au travail», Vincent Mandinaud

• « L'économie numérique, une géographie paradoxale », Bruno Moriset

«Digitalization, automation and job polarization in Europe», Enrique Fernández-Macías

• «Thales, un groupe international leader dans les domaines des hautes technologies», Didier Pignon

• «Numérique, travail et emploi : une cartographie des conteoverses», François Levin et Judith Herzog

 

 

 

COMPLÉMENTS

• « Jeff Bezos le nouveau maître du monde », L'Obs du 27/09/2018

 

À PROPOS

CRÉDITS

MENTIONS LÉGALES

JUMIA. E-commerce, livraison repas, booking. Fondé au Nigeria en 2012. Présent dans 14 pays : l'Algérie, le Maroc, la Tunisie, le Kenya, l'Égypte, l'Ouganda, le Cameroun, le Sénégal, le Ghana, le Rwanda, l'Afrique du Sud, la Tanzanie et la Côte d'Ivoire. Il est détenu à 20% par le groupe ayant lancé Zalando en Allemagne. Chiffre d'affaires en 2017 : 502 millions d'euros.

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CONTROVERSE 1 

EXISTE-T-IL DES MODÈLES ÉCONOMIQUES NON PRÉDATEURS ?

 

CONTROVERSE 2 

DU SOUTIER DU NUMÉRIQUE AU SLASHER : PENSER LE TRAVAIL DE DEMAIN

 

 

Chapitre 1

Tous indépendants, tous prolétaires 4.0... ou sans emploi

 

Chapitre 2

De l'entreprise libérée au néo-taylorisme

 

Chapitre 3

Le collectif de travail, une valeur dépassée ou réaffirmée ?

 

Chapitre 4

Un dialogue social renouvelé ?

Chapitre 1

Face aux GAFAM et BATX, une régulation est-elle possible ? 

 

Chapitre 2

Un modèle économique communautaire est-il possible dans le numérique ?

 

Chapitre 3

La data, nouvel eldorado ou parfait big brother ?

 

Chapitre 4

Capital Humain vs capital technologique

CONTROVERSE 3 

LA FORMATION À L'ÉPREUVE DU NUMÉRIQUE : LE CHANGEMENT DES PARADIGMES

 

 

Chapitre 1

La formation au coeur du changement culturel

 

Chapitre 2

Comment se forme-t-on dans un environnement numérique en constante transformation ?

 

Chapitre 3

Comment reconnaître, valoriser, certifier et qualifier ses acquis ?